LE MONDE
« À la recherche des émotions musicales perdues. »
NEW YORK TIMES
« Documenter et mettre en perspective le chemin d’une culture de poche en émergence : le défi réussi d’un ouvrage scientifique et sensible. »
POEZIBAO, LE JOURNAL PERMANENT DE LA POÉSIE
« L’auteur dessine, à grand renfort de témoignages, la culture mourante d’une musique de l’instant grâce à l’éternel chant des oiseaux de passage. »
L’HUMANITÉ
« Avec le smartphone, l’art est dans la poche jour et nuit, tandis que le live apporte une puissance émotionnelle. Le chercheur interroge in fine le rapport binaire des habitants à l’art, entre culture et divertissement. Une recherche très franco-française. »
ELLE
« De l’amour de la musique, quotidien des Français, notre sociologue national se fait narrateur des invisibles. Un livre rare. »
ROCK’N’FOLK
« Culture du risque/culture de poche : un sociologue parvient à qualifier un fait social qui ne cesse de hanter les mélomanes. Ses outils de travail ? La marche à pied et les récits de Sylvain Tesson. Son mantra ? Le même que Sylvain Tesson : “Si tu tombes, c’est la chute, et si tu chutes, c’est la tombe.” »
LE FIGARO
« De la pop à la musique baroque, des Centres culturels de rencontre à Spotify, l’essai embrasse et interroge nos pratiques culturelles, solitaires ou collectives. Travail fouillé, non dénué de partis pris, à lire et relire pour dépasser l’impression qu’il pourrait s’agir d’une simple étude de marché cherchant à placer une nouvelle application en cours d’élaboration. »
RURAL MAGASINE
« Très terre à terre, ce livre fait le constat, à partir de deux cents témoignages, d’une culture ancrée dans le terroir. »
MAC MAGAZINE
« Greg Orien, sociologue de l’iPoche — la culture à portée de main. Un champ de recherche infini. On attend le tome 2. »
LINUX MAGAZINE
« Les recherches de Greg Orien l’orientent vers la conception d’une application qui permettrait de composer en temps réel selon le contexte et l’utilisateur (la base de données compose la musique). Le but de cette application ? Écouter des musiques qui nous ressemblent, dans un environnement olfactif choisi. Un projet qui ne sent pas très bon. »
LES INROCKUPTIBLES
« Pourquoi attendre la conclusion et la 286e page pour évoquer la perméabilité des pratiques d’écoute en live et en streaming ? L’intérêt de l’ouvrage réside dans les témoignages recueillis, davantage que dans leur traitement conceptuel. »
MUSIQUE INFOS
« À lire pour les succulents témoignages, devenus cultes dans le milieu de la musique, comme “Les gens écoutent n’importe quoi et n’importe comment”. Un classique de la sociologie. »
En 2019, missionné par la région Auvergne—Rhône-Alpes, le sociologue Greg Orien, auteur du fameux ouvrage La culture ou le divertissement ?, enquête auprès des habitants et habitantes d’Ambronay sur leur rapport à la musique, particulièrement la musique baroque : le village est réputé pour son festival de musique ancienne. Au hasard de ses pérégrinations, tantôt chez l’habitant, tantôt à son domicile pour une fondue bourguignonne avec ses enfants et les voisins du village, Greg Orien propose des expériences d’écoute collective en live et en streaming. Une sociologie de la proximité, entre rigueur et sensible, qui affronte avec finesse une question de notre temps : que se passe-t-il, notamment pour les pratiques anciennes, quand la musique entre dans le numérique.
Page 31
UN STAGIAIRE EN ALTERNANCE, 19 ANS. Ces sons anciens, ils sont complètement pétés, non ? Pourquoi aller déterrer tout ça ? Des sons pas à nous, pas conçus pour être joués six siècles plus tard, dans ce bled d’Ambronay ! Les concerts vivants, je ne peux plus m’y rendre, de toute façon. Étrangement, ils ne me manquent pas trop.
Maintenant les concerts viennent à moi. Spotify joue dans mon salon. Pour dix euros par mois. En présence de mes potes. Avec qui j’écoute cinquante fois le même morceau. Et c’est bon. C’est bon de rester chez soi. Avec son propre mur de son.
Page 82
UNE LYCÉENNE, 16 ANS. La musique ? Je ne l’écoute qu’en jeux vidéo ou sur TikTok. Les morceaux de plus de vingt secondes, ça m’ennuie.
Page 97
UNE RETRAITÉE, 73 ANS. J’ai besoin d’œuvres musicales qui me font du bien sans effort, et j'ai besoin d’œuvres qui m'emmènent peut-être un peu plus haut, où je suis prêt à donner quelque chose de moi. C’est évidemment plus aisé de donner quelque chose de soi en présence de l’interprète. C’est peut-être pour cela que je fréquente le Festival de musique ancienne d’Ambronay depuis tant d'années. Pour donner quelque chose de moi.
Page 103
UNE ÉTUDIANTE EN ART, 22 ANS. Paraît que ces musiciens chercheurs au Centre culturel de rencontre seraient en quête d’une « authenticité ». Ils oublient une chose : l’origine historique paraît difficile à cerner ; sans témoignages audio, photo, vidéo de l’époque, cette quête des origines est un peu suspecte, vous ne trouvez pas ?
Page 113
UN ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ, 53 ANS. Ce langage musical est si ancien que l’œuvre est complètement réinterprétable. Et puis, nous aussi on interprète leur musique de « baroqueux ». Nous aussi on se raconte des histoires face aux histoires qu’ils nous racontent. Nous aussi on a le droit à la parole. Mais notre parole d’interprètes n’intéresse pas. Bons qu’à écouter. Bons qu’à se taire. Bons qu’à applaudir. Bons qu’à ça.
Page 108
UN SANS EMPLOI, 7 ANS. La musique c'est avec le téléphone de maman ou avec le téléphone de papa. Souvent ils disent non,
souvent j’ai envie quand même.
Page 135
UNE EMPLOYÉE DE COMMERCE, 61 ANS. Je n’y connais rien dans leur appli-machin-chose. Je suis davantage fascinée par des instruments comme la viole de gambe, cet instrument qui arrive du fin fond des siècles. Quand on pense qu’ils ne sont plus que trois au monde à en jouer : il n’y a plus de luthier. Les cordes disponible sont maintenant fabriquées en masques recyclés. Ça se réinvente, tout se réinvente.
Page 142
UNE MUSICIENNE, 35 ANS. Mon travail est d’incarner. Les auditeurs ont besoin de mon corps d’interprète — un intermédiaire — pour que leur soient livrés certains écrits de compositeurs. Et ce corps peut défaillir, les cordes de l'instrument peuvent défaillir, le lieu où je joue peut défaillir. Jouer en live, c'est un suspens en direct. On est vulnérable. Et c'est peut-être cela qui crée de l’émotion.
Page 167
UN CADRE INTERMÉDIAIRE, 38 ANS. Sur Spotify, on a peu de chance que la corde d’un instrument pète pendant le morceau. Sur Spotify, quand on se brosse les dents ou que l'on mange des chips, on a peu de chance que le groupe s’arrête en disant : « Hé coco, mais tu fais quoi, là. Tu sais combien d’années ça nous a prit pour jouer juste, ces trois accords ? […] Sur Spotify, on est libres. Libres de nos émotions. Libres de nos gestes.
Page 195
UN NON-CADRE, 41 ANS. En écoute live, on ne peut pas mettre en pause, revenir et réécouter : il faut profiter de ce qu'il se passe au moment où ça joue. Cette urgence de l'écoute procure des sensations exceptionnelles.
Page 239
UNE ÉTUDIANTE-SUR-LE-TARD, 31 ANS. Avec le professeur Orien, nous avons mis les enquêtés face à un dilemme fictif : préférez-vous, à partir d’aujourd’hui, réentendre votre musique préférée, ou avoir accès, à volonté, à l’ensemble des nouvelles créations ? Les trois quarts des enquêtés choisissent d’écouter des nouveautés, quitte à ne plus jamais écouter leur play-list.
Page 256
UN MÉLOMANE, 47 ANS. Ce sont les codes du concert qui empêchent cette musique d’être accessible à tous, ce n’est pas la musique elle-même. Pourquoi ne peut-on pas applaudir entre les mouvements d’un concert de viole de gambe ? Pourquoi doit-on se taire ? Ces codes se sont imposés au fil des siècles, mais à l’époque on pouvait peut-être manger des chips ou autre chose. Si on veut reconstituer les musiques anciennes, on doit aussi penser la reconstitution du live.
Greg Orien est marié. Il est aussi sociologue. Originaire de Sardaigne (Italie), il a grandi dans les Cévennes (France). Professeur émérite à l’université de Saint-Étienne, il est spécialiste de l’exception culturelle française. Passionné par les chants populaires et amateur d’accordéon, il choisit comme terrain de jeu les milieux ruraux pour questionner notre rapport à la culture, plus particulièrement la pratique du spectateur.
Sous ses airs de soixante-huitard, Greg Orien est un auteur de talent, avide de rencontres. Muni de son fameux bâton de pèlerin et de bonnes chaussures de marche (ses outils de travail), il aime à dire qu’il est « payé pour s’étonner ».
Je ne suis pas une bête sauvage, L’arbre qui cache la forêt, 1998.
Demain je serai un autre, Éditions du Triboulet, 2001.
La culture ou le divertissement ?, La Découverte, Paris, 2004.
Sur les chemins noirs de la culture ?, La Découverte, Paris, 2009.
Si j’avais été ministre de la Culture, La Découverte, Paris, 2012.
Spectacle vivant, est-ce encore utile ?, La Découverte, Paris, 2015.
Ambronay (Ain, France)
Centre culturel de rencontre d’Ambronay (CCR)
Ouvrage conçu lors de la rencontre du 19 mars 2021, proposée à un public dit captif constitué de professionnel·les et de lycéen·nes.
En présence de : Greg Truchet, La Petite Compagnie (dans le rôle de l’auteur) — Pierre Bornachot, directeur artistique du CCR d’Ambronay (dans le rôle du critique littéraire) — Élisabeth Angot, compositrice (dans le public) — Lucile Boulanger, musicienne, viole de gambe (dans le rôle de la représentante de la musique ancienne).
Coordination du projet : Marina Roche-Lecca.